La soirée Jazz vocal, le mardi 8 juillet proposait aux 4 300 festivaliers installés sur les gradins du théâtre antique de Vienne trois chanteuses extrêmement différentes les unes des autres. De Célia Kameni qui susurre et joue la carte de l’intimisme, à Madeleine Peyroux qui raconte des histoires en chantant et utilise ses chansons comme manifestes politiques, à Dianne Reeves qui à 69 ans, n’a rien perdu, ni de sa voix, ni de sa présence ; bref, une nouvelle fois en diva qui a surplombé la soirée.
Il ne reste plus beaucoup de grandes divas du Jazz qui fassent totalement l’unanimité.
Dianne Reeves que l’on n’avait pas aperçu depuis longtemps sur la scène de Jazz à Vienne-sa dernière venue datait de 2012 !- fait partie de cette catégorie, tant sa forte présence, son talent, sa voix inaltérée à 69 ans sont devenues une évidence en final de la soirée Jazz vocal de Jazz à Vienne. Respect !
Elle a totalement subjugué le public du théâtre antique, malgré, il est vrai une grande fraîcheur qui faisait suite aux grosses chaleurs de la canicule passée.
Le mot fraîcheur convient bien à la chanteuse américaine qui a su traverser les décennies, tant son chant, son art, semblent couler de source s’appuyant sur une voix à la fois ample, aux inflexions chaleureuses et enveloppantes.
John Beasley au piano
Cinq fois récompensée d’un Grammy Award, Dianne Reeves a une nouvelle fois irradié la scène à la fois par sa technique, sa générosité, et ses « impros », sachant distiller mille nuances dans ses interprétations.
Madeleine Peyroux en raconteuse d’histoires
Auparavant la chanteuse Madeleine Peyroux a voulu se disculper d’être américaine à l’ère Trump, multipliant piques et déclarations, mâtinées de beaucoup d’humour, terminant son show le poing levé.
Elle a aussi et surtout présenté quelques-unes des principales plages de son dernier opus, Let’s Walk (« Marchons »), son premier album depuis six ans, écrit en compagnie du guitariste Jon Herrington dans lequel elle fusionne tout ce qu’elle sait faire, et elle a fréquenté beaucoup de styles, mélangeant gospel, blues, jazz, folk, et même chanson française…
Célia Kameni « méduse » le public
La soirée a débuté avec la chanteuse lyonnaise Celia Kameni qui a proposé pour ouvrir ce festival de voix, un tout autre registre, beaucoup plus intimiste, susurrant même parfois ses chansons, tirées de son dernier album « Méduse »,… médusant de la sorte son public par une approche très éthérée ; mais servie par une voix solaire, sensible, source d’émotions partagées.
En s’appuyant sur le « piano préparé » (dont le son a été altéré en y plaçant divers objets) de Thibault Gomez et sur le violoncelle de Juliette Serrad, Célia Kameni nous a emmené dans son monde dans lequel le public a pénétré avec plaisir, presque gourmandise.
Seul bémol : une utilisation un peu trop appuyée des réverbérations.
Bref, nonobstant la fraîcheur de l’air totalement inattendue qui a fait fuir une partie du public frigorifié, ce fut une soirée de cette 44ème édition marquée d’une belle pierre blanche.
PHOTOS PHILIPPE SASSOLAS